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Présentation Cécile

Posté : 16 sept. 2025, 09:44
par CCLEMENT
Bonjour,

Je m'appelle Cécile, et c'est mon conjoint (31 ans) qui a été diagnostiqué d'une SEP en décembre dernier, alors que j'étais enceinte de notre premier enfant. J'ai beaucoup de mal à encaisser cette nouvelle, je suis de nature anxieuse et hypocondriaque, et cette maladie et toutes les incertitudes qu'elle génère réactive puissance 1000 mon tempérament anxieux. Il prend actuellement du Kesimpta, va plutôt bien pour le moment avec quelques symptômes sensitifs qui m'inquiètent néanmoins (sensation de "courbatures" légères dans les jambes de manière intermittente).

J'ai fait beaucoup de recherches (sans doute trop...) sur internet et je m'interroge sur la frontière qui me semble floue entre les formes rémittentes et les formes progressives. Mon conjoint a en effet eu un épisode de fourmillement dans les jambes caractérisé comme une poussée (visible à l'IRM) qui s'est arrêté, mais a parfois également des symptômes légers et intermittents (sensation d'engourdissement très léger d'un côté du visage, sensation de jambes un peu lourdes). Je ne sais pas s'il s'agit là de "poussées" ou simplement de symptômes secondaires de la maladie.

Je me demande aussi comme gérer cette maladie et l'incertitude qu'elle entraîne en tant que conjointe. J'ai parfois l'impression de davantage m'inquiéter et penser à la maladie que lui. Je pense faire appel à un psychologue pour pouvoir partager mes angoisses.

Merci pour l'existence de ce forum et au plaisir de vous lire

Re: Présentation Cécile

Posté : 16 sept. 2025, 10:30
par mariel13
Bonjour Cecile,

Malheureusement, bienvenue parmi nous :mrgreen:

Et tu as raison vas en discuter avec un psy ou une… et il y a autant de sep que de sepiens…

Donc encore bienvenue et vivez votre vie avec cette colocataire …
Sinon, , internet n’est pas forcément conseillé :mrgreen:
Courage et bonne journée !

Re: Présentation Cécile

Posté : 16 sept. 2025, 10:45
par Margot
Bonjour Cécile,
Les symptômes secondaires que tu décris ne signalent pas une poussée mais plutôt des " petits signes " que nous fait la maladie de temps à autre.
Comme le conseille MarieL, oublie un peu internet et prends rendez-vous auprès d'un psy puisque tu es déjà d'un naturel anxieux, il faut que ru trouves un certain apaisement qui te permettra de prendre du recul.
Bon courage à vous deux.

Re: Présentation Cécile

Posté : 16 sept. 2025, 11:33
par Nostromo
Salut Cécile, sois de tout cœur la bienvenue parmi nous.

Ta démarche me parle intimement, en ce sens que lorsque j'ai été diagnostiqué, ma femme venait trois mois plus tôt d'accoucher de notre premier fils. Il a aujourd'hui trente ans et a été suivi de deux frères. Tu es donc toi aussi maintenant jeune maman, félicitations, comment cela se passe-t-il, vous vous en sortez ?

Il y a trente ans donc, quand, après une poignée de semaines de processus diagnostic, le terme de sclérose en plaques avait commencé à être exprimé devant moi, j'avais remonté l'information en douceur à ma femme. Sa réaction avait été aussi instantanée qu'explicite : "ah, t'as pas intérêt, hein !" :mrgreen:. Je lui en avais tellement voulu que par la suite notre couple avait traversé une période pour le moins tumultueuse d'environ une année (un peu moins), au cours de laquelle j'avais même très sérieusement envisagé de divorcer. Et puis, tout ça s'était tassé. Ce n'est que bien plus tard que j'avais pris conscience que le TGV que je m'étais pris en pleine poire avec le diagnostic, bah elle se l'était plus ou moins pris elle aussi, qu'elle avait géré ça comme elle avait pu et que j'avais peut-être fait preuve d'un certain manque d'empathie envers elle.

Et donc : un tel diagnostic peut engendrer des difficultés de communication au sein d'un couple, mais sois bien persuadée que pour ton mari, dont la santé est d'un coup devenue un énorme point d'interrogation, tu es un de ses derniers repères à peu près stables, peut-être le plus solide dont il dispose. Il te faut donc garder une main ferme sur la barre, rester forte, ne jamais te laisser abattre. Je sais fort bien que c'est plus facile à dire qu'à faire, mais tout autant que je sais, mon épouse m'en ayant au fil du temps apporté la démonstration, que ça reste tout à fait possible <2

Tu as très bien compris qu'une sep débutante, comme l'est celle de ton mari, est avant tout un océan d'incertitude ; ce qu'entre nous nous avons coutume d'appeler l'épée de Damoclès. Le pronostic individuel de chaque patient étant réputé impossible, ce n'est notamment pas parce que jusqu'ici ça se sera passé comme ci ou comme ça, que quiconque (le meilleur des neurologues, par exemple) peut avoir la moindre certitude que dans un an, cinq ans, dix ans, ..., la maladie de ton mari aura évolué de telle façon plutôt que de telle autre. En fait, il s'agit pour vous de quitter une existence où vous suiviez une route bien tracée et bien droite, pour une autre qui serait plutôt composée de sentiers escarpés sur du terrain glissant, avec une vision à beaucoup plus court terme. Cela va nécessiter un changement plus ou moins important dans votre façon d'aborder l'existence (en général, plus que moins), mais un tel changement peut réellement se montrer très positif.
J'ai fait beaucoup de recherches (sans doute trop...) sur internet et je m'interroge sur la frontière qui me semble floue entre les formes rémittentes et les formes progressives. Mon conjoint a en effet eu un épisode de fourmillement dans les jambes caractérisé comme une poussée (visible à l'IRM) qui s'est arrêté, mais a parfois également des symptômes légers et intermittents (sensation d'engourdissement très léger d'un côté du visage, sensation de jambes un peu lourdes). Je ne sais pas s'il s'agit là de "poussées" ou simplement de symptômes secondaires de la maladie.
On trouve de tout, sur internet, le meilleur comme le pire :mrgreen:. Sachez simplement, pour l'instant, vous méfier des gourous qu'on peut y rencontrer.

En supposant que le diagnostic d'une forme rémittente soit exact, ce dont je n'ai a priori aucune raison de douter, ton mari est alors très probablement beaucoup trop jeune, tout autant en termes d'âge que d'ancienneté dans la maladie, pour avoir déjà basculé sur une forme progressive. La forme progressive, pour lui, n'apparaîtra sans doute pas avant une dizaine d'années, sans doute plus tard que ça et peut-être jamais (le pronostic individuel étant impossible, une telle forme peut certes se déclarer chez lui demain, mais c'est très hautement improbable).

Qui dit poussée dit inflammation en cours à l'intérieur du système nerveux central, avec apparition de nouveaux symptômes ou réapparition de symptômes plus anciens, pendant une durée d'au moins vingt-quatre heures. Les symptômes que tu décris, et notamment leur intermittence, me font assez nettement penser à ce que certains neuros appellent des réminiscences, des retours sporadiques de certains symptômes, mais sans qu'on puisse parler de poussée puisque ces symptômes sont intermittents. Des symptômes déjà rencontrés lors d'une poussée mais qui semblaient depuis avoir disparu, peuvent toujours réapparaître jusqu'à des années plus tard, par exemple (très fréquent dans la maladie) à l'occasion d'un syndrome d'Uhthoff, qui consiste en une aggravation transitoire d'anciens symptômes, aggravation provoquée par une élévation de la température corporelle (fièvre, exercice physique trop intense, température ambiante trop élevée, etc.). Une telle aggravation transitoire peut également se manifester sous l'effet du stress ou d'une grande fatigue mais, dans tous les cas, elle n'a pas d'impact sur l'évolution ultérieure de la maladie -- et donc, pas de panique 8).
Je me demande aussi comme gérer cette maladie et l'incertitude qu'elle entraîne en tant que conjointe. J'ai parfois l'impression de davantage m'inquiéter et penser à la maladie que lui. Je pense faire appel à un psychologue pour pouvoir partager mes angoisses.
Ton mari est, comme toi, en train d'essayer d'avaler un trop gros morceau, qu'il va ensuite s'agir de digérer. Il me semble être encore dans sa phase de sidération, encore en état de choc si tu veux. C'est normal après l'annonce d'un tel diagnostic, ça fait partie de ce qu'on appelle la phase d'acceptation de la maladie (qui peut prendre des mois, des années...), ça ne durera qu'un temps.

L'IA de Google me donne cette définition pour la phase d'acceptation :
l'IA de Google a écrit :La phase d'acceptation d'une maladie n'est pas une étape isolée, mais le dénouement d'un processus non linéaire comprenant le déni, la colère, le marchandage et la dépression, inspiré du modèle de Kübler-Ross. Elle n'est pas synonyme de bonheur, mais d'une adaptation à la nouvelle réalité, où le patient se sent prêt à « faire avec » la maladie pour continuer à vivre, tout en cherchant des ressources pour aller de l'avant. Cette phase est unique pour chaque individu et peut être influencée par de nombreux facteurs, comme la personnalité du patient et son entourage.
Je suis pour une fois très d'accord avec l'IA de Google :mrgreen:.

Un psychologue pourra certainement te / vous aider à défricher tout ça, mais c'est à chacun de suivre son propre chemin, en fonction des personnalités de chacun ça n'est pas forcément nécessaire.

A très bientôt j'espère le plaisir de te lire,

Jean-Philippe.

Re: Présentation Cécile

Posté : 17 sept. 2025, 16:43
par CCLEMENT
Bonjour à tous et toutes,

Merci pour vos réponses chaleureuses. Cela me fait du bien de vous lire et d'avoir des témoignages. Comme je lis la définition que l'IA de Google propose Jean-Philippe, je sens bien que, en tant que conjointe, je suis en pleine phase de négociation interne avec la maladie : il y a des jours où je me dis "je suis prête à vivre avec" et d'autres où j'ai l'impression que notre vie va être horrible, qu'évidemment notre fils va lui-même développer la maladie, que l'état de mon conjoint va se détériorer rapidement, que "pourquoi nous, alors que tout allait bien ?".

L'annonce de la maladie couplée à la naissance de notre premier enfant (avec qui tout se passe bien, adorable bébé!) a bouleversé la dynamique de notre couple. Sans que ce soit devenu particulièrement conflictuel pour autant. Le problème c'est que je suis davantage dans un rapport "maternant" et anxieux à son égard ; je cherche à le préserver des nuits difficiles avec le bébé pour qu'il ne se fatigue pas trop, je lui dis "va à la piscine", je lui demande s'il a bien pris sa vitamine D ce matin... ça part d'un bon sentiment hein, mais je me rends bien compte en le disant qu'une telle attitude peut avoir tendance à le réduire à la maladie, comme s'il n'était plus que ça à mes yeux !

Nous avons les réactions très différentes face à la maladie. Lui se laisse porter par les médecins, fait confiance dans le traitement, a dû taper une fois max dans Google "sclérose en plaque". Son inquiétude principale concerne la sphère professionnelle ; il a actuellement un emploi dans lequel il est assez tranquille, voire trop tranquille, mais hésite à en changer par peur de se "cramer" selon ses mots, dans un nouvel emploi plus exigeant et stimulant.

De mon côté, j'ai littéralement retourné internet anxieusement (cf ma présence ici haha) à la recherche de la moindre information susceptible de me rassurer... ce qui a eu évidemment l'effet inverse. J'ai compris que bien qu'il existait des facteurs, cliniques et radiologiques, de bon ou de mauvais pronostic, personne, même le meilleur neurologue comme tu le dis Jean-Philippe, n'est en mesure de prédire l'évolution de la maladie... ce qui est assez insupportable pour moi qui ai un grand besoin de sécurité et d'anticipation. Je dois apprendre à changer de logiciel, pour ne pas me laisser dévorer par l'angoisse, mais aussi pour le soutenir lorsqu'il en aura besoin. Mais c'est difficile ! Si je me mets à sa place, je suis une conjointe insupportable toujours sur le qui-vive, et à l'affut du moindre nouveau symptôme qui laisserait penser que la maladie progresse, qui lui jette des regards anxieux dès qu'il présente une petite manifestation de fatigue...J'ai conscience que ce n'est évidemment pas de ça dont il a besoin. Le fait qu'il exprime très peu d'inquiétude face à la maladie (dont les manifestations sont effectivement pour le moment bénignes) me pousse paradoxalement à endosser ce rôle encore davantage : j'imagine que s'il s'autorisait à s'épancher davantage, je jouerais un autre "rôle", plus rassurant et soutenant. Bref, c'est une drôle de dynamique.

Je m'interroge finalement sur le suivi médical de cette maladie. Mon conjoint a eu hier son rdv chez le neurologue (au CHU de Rennes, qui a plutôt bonne réputation pour la SEP), le premier depuis la mise en place du traitement (Kesimpta) en janvier dernier. Je suis assez étonnée du déroulement de ce rdv : pas d'examen clinique, deux nouvelles "petites" lésions cérébrales dans une zone asymptomatique qui n'inquiètent pas a priori la neurologue, et qui s'expliquent pour elle par le délai entre la dernière IRM (octobre 2024) et la mise en place du traitement (Janvier 2025). Et prochaine IRM dans un an seulement ! Et ce n'est pas faute de l'avoir lourdement interrogé et relancé sur ces délais ! Pour elle c'est une forme "classique" qui se "traite très bien grâce aux traitements actuels". Elle se dit confiante et se montre rassurante. Très bien. Mais une petite partie de moi n'est pas totalement convaincue. Elle présente le Kesimpta comme ayant un taux d'efficacité de 99%. Je ne suis pas allée vérifier mais ça me semble beaucoup. Je suis donc partagée : j'ai envie de faire confiance, de me dire que tout va bien se passer, de ne plus y penser et de "vivre la vie normalement" comme le conseille la neurologue. D'un autre côté, tout ce que j'ai lu sur le sujet me laisse penser que les choses ne sont pas si simples que ça. Enfin peut-être qu'elles le seront ... ou peut-être pas ... On en revient toujours à la question de la gestion de l'incertitude !

Désolée pour le pavé, c'est sans doute une peu confus tout cela, mais je me rends compte que cela me fait du bien d'écrire et de faire du tri dans mes pensées... même si je dois avoir l'air d'une affreuse conjointe névrosée !
Je serai heureuse de vous lire !
Cécile

Re: Présentation Cécile

Posté : 17 sept. 2025, 17:14
par Margot
CCLEMENT a écrit : 17 sept. 2025, 16:43 Nous avons les réactions très différentes face à la maladie. Lui se laisse porter par les médecins, fait confiance dans le traitement, a dû taper une fois max dans Google "sclérose en plaque". Son inquiétude principale concerne la sphère professionnelle ; il a actuellement un emploi dans lequel il est assez tranquille, voire trop tranquille, mais hésite à en changer par peur de se "cramer" selon ses mots, dans un nouvel emploi plus exigeant et stimulant.

Je m'interroge finalement sur le suivi médical de cette maladie. Mon conjoint a eu hier son rdv chez le neurologue (au CHU de Rennes, qui a plutôt bonne réputation pour la SEP), le premier depuis la mise en place du traitement (Kesimpta) en janvier dernier. Je suis assez étonnée du déroulement de ce rdv : pas d'examen clinique, deux nouvelles "petites" lésions cérébrales dans une zone asymptomatique qui n'inquiètent pas a priori la neurologue, et qui s'expliquent pour elle par le délai entre la dernière IRM (octobre 2024) et la mise en place du traitement (Janvier 2025). Et prochaine IRM dans un an seulement ! Et ce n'est pas faute de l'avoir lourdement interrogé et relancé sur ces délais ! Pour elle c'est une forme "classique" qui se "traite très bien grâce aux traitements actuels". Elle se dit confiante et se montre rassurante. Très bien. Mais une petite partie de moi n'est pas totalement convaincue. Elle présente le Kesimpta comme ayant un taux d'efficacité de 99%. Je ne suis pas allée vérifier mais ça me semble beaucoup. Je suis donc partagée : j'ai envie de faire confiance, de me dire que tout va bien se passer, de ne plus y penser et de "vivre la vie normalement" comme le conseille la neurologue. D'un autre côté, tout ce que j'ai lu sur le sujet me laisse penser que les choses ne sont pas si simples que ça. Enfin peut-être qu'elles le seront ... ou peut-être pas ... On en revient toujours à la question de la gestion de l'incertitude !

Désolée pour le pavé, c'est sans doute une peu confus tout cela, mais je me rends compte que cela me fait du bien d'écrire et de faire du tri dans mes pensées... même si je dois avoir l'air d'une affreuse conjointe névrosée !
Je serai heureuse de vous lire !
Cécile
Bonjour chère névrosée ! :D
Je trouve que ton conjoint réagit au mieux : il fait confiance à son médecin et au traitement, il semble rester calme. Et il est plutôt en forme donc laisse le mener sa vie comme il le faisait jusqu'à présent. De toute façon l'incertitude sera toujours présente, en fait c'est le lot de tous, malade ou pas, mais avec la sep cette incertitude est, disons, plus présente à notre conscience. Tu auras beau taper du pied et t'arracher les cheveux, tu n'y changeras rien. Ce que tu peux faire c'est réfléchir à l'opportunité de prendre du recul, t'inquiètes la sep est une maladie qui évolue lentement, parfois très lentement, surtout avec les traitements récents, ton chéri a de beaux jours devant lui.
Amicalement.

Re: Présentation Cécile

Posté : 17 sept. 2025, 23:13
par Nostromo
Salut Cécile,
CCLEMENT a écrit :Comme je lis la définition que l'IA de Google propose Jean-Philippe, je sens bien que, en tant que conjointe, je suis en pleine phase de négociation interne avec la maladie : il y a des jours où je me dis "je suis prête à vivre avec" et d'autres où j'ai l'impression que notre vie va être horrible, qu'évidemment notre fils va lui-même développer la maladie, que l'état de mon conjoint va se détériorer rapidement, que "pourquoi nous, alors que tout allait bien ?"
Alors :mrgreen:

D'abord, évidemment que tu es toi aussi en train d'essayer d'avaler un trop gros morceau. Mais il ne faut pas forcément trop en faire. Le coup de s'assurer tous les matins que ton mari a bien pris sa vitamine D, ça fait un peu garde-malade, ça lui fait donc bien prendre conscience de la présence de sa maladie, pour une efficacité assez aléatoire. Cette attention exacerbée peut avoir un impact sur la façon dont il va réussir à gérer la bête. Pour info, je n'ai quant à moi jamais ressenti le besoin de me supplémenter en vitamine D et en ce moment, c'est même ma femme qui en fait une cure. Le monde à l'envers :mrgreen:. Mais je vis beaucoup au grand air, j'ai la peau bien tannée par le soleil, donc je me dis que ça doit suffire.

Il est vain de chercher une quelconque explication à l'apparition de la maladie. Un jour elle n'était pas là, le jour d'après elle était là, mais nul ne sait ce qui déclenche la sclérose en plaques. Si on sait plus ou moins ce qui peut déclencher une poussée (une infection notamment, on pense également beaucoup au stress bien que ce soit moins net, ainsi que d'autres raisons), on n'a aucune idée de ce qui va déclencher une sep en premier lieu. Quant à la transmission entre ascendants / descendants, il y a certes des formes familiales de sclérose en plaques, il y a certes un (léger) surrisque de développer une sep quand tu as un parent atteint, mais de l'avis général ce surrisque peut être négligé.

En fait, ce qu'on croit savoir sur ce qui va provoquer une sep chez quelqu'un, c'est -- comme pour beaucoup d'autres maladies -- la conjonction de gènes de prédisposition (que, si aucun de ses parents ne les a, le gamin ne risque pas de récupérer) avec des facteurs environnementaux : tu connais déjà le rôle de la vitamine D, c'en est un, il y en a une chiée d'autres, comme l'exposition préalable à un virus donné par exemple, ou encore peut-être une alimentation déséquilibrée. Mais la liste exhaustive est quasi-infinie, de la même façon que pour les gènes de prédisposition : si ça se trouve ton mari n'en a qu'un seul, alors que de ton côté tu en as plusieurs : ce n'est pas parce que tu es porteuse de tel et tel gènes de prédisposition, que tu vas nécessairement développer la maladie.

Si je regarde ce qu'a été mon existence depuis le diagnostic, trente ans de recul donc, je n'hésite pas à affirmer que le diagnostic l'a finalement rendue plus belle, plus riche, plus consciente, plus ouverte au monde. Mais je reconnais tout de même que ma sep m'a fait la grâce, après un démarrage assez intense, de rapidement me laisser tranquille : ce n'est pas tout le monde qui peut en dire autant, loin de là, mais beaucoup peuvent néanmoins le dire. Le problème est qu'il est impossible d'établir des statistiques fiables sur le sujet (et par conséquent d'espérer en trouver, que ce soit sur internet ou ailleurs :mrgreen:) : ceux qui s'en sortent bien finissent par passer sous la couverture radar, ils ne fréquentent plus les hôpitaux, ils ne sont plus suivis en neurologie, comment les statistiques en tiendraient-elles compte ? Un peu de la même façon que les journaux ne parlent pas des trains qui arrivent à l'heure, ça ne les intéresse pas.

Je trouve les inquiétudes professionnelles de ton mari assez justifiées : s'il est heureux dans son boulot, ma foi... Je suis quelque part fermement convaincu (chacun ses croyances obscurantistes) que le stress professionnel intense que je subissais juste avant mon diagnostic a joué un rôle majeur dans l'apparition de la poussée carabinée qui a abouti à ce diagnostic, comme je ne peux pas m'empêcher de penser qu'avoir, ensuite, progressivement dégagé l'essentiel des sources de stress dans ma vie a forcément joué un rôle dans son évolution ultérieure favorable. En vrai, à l'échelle de chaque patient, il est évidemment impossible de l'affirmer, mais tout autant qu'il est impossible d'affirmer que tel ou tel traitement est efficace sur l'évolution du patient : en effet, dans un cas comme dans l'autre, tenir un tel propos nécessiterait de présupposer un pronostic plus défavorable. Or le pronostic individuel, ... bref :mrgreen:.

La sep, c'est le monde du brouillard. Pas que pour les patients ni leurs proches : pour les neurologues aussi. Seulement, parmi les neuros, tu trouveras ceux qui l'admettront, et ceux qui prétendront que pas. Ceux qui l'admettent sont beaucoup plus dignes de confiance que ceux qui ne l'admettent pas.
J'ai compris que bien qu'il existait des facteurs, cliniques et radiologiques, de bon ou de mauvais pronostic
Ouais... hum. C'est sur le "radiologiques" que je tique. Ca énerve beaucoup de neuroradiologues, qui voudraient absolument pouvoir donner une valeur pronostique à leurs IRM (tu pourras googler l'expression "paradoxe clinico-radiologique" si tu te sens en manque d'internet). Fiente de baleine que tout ça :mrgreen:. Donc oui, c'est le meilleur conseil que je puisse te donner : changer le logiciel. Cela fait partie des choses dont tu pourras parler avec un psychologue, mais encore faut-il qu'il soit conscient de cette énorme inconnue. Or les professionnels de santé, du neurologue au psychologue, montrent volontiers une très fâcheuse tendance à accorder une confiance aveugle aux traitements. Je pense que c'est une erreur, les traitements étant efficaces contre quelque chose de certes très visible, certes très impressionnant (les poussées) mais dont, statistiquement du moins, on se fout pour ce qui est de l'évolution à long terme (voir plus bas).

Prendre conscience de la fragilité de l'existence, n'est-ce pas une condition essentielle pour réellement en profiter ?
Si je me mets à sa place, je suis une conjointe insupportable toujours sur le qui-vive, et à l'affut du moindre nouveau symptôme qui laisserait penser que la maladie progresse, qui lui jette des regards anxieux dès qu'il présente une petite manifestation de fatigue...J'ai conscience que ce n'est évidemment pas de ça dont il a besoin.
Avec la sep, que tu sois sujet à des réminiscences temporaires de symptômes ou à de grosses fatigues, ne dit rien (rigoureusement) de ce que tu seras dans cinq, dix, vingt ans (et au delà). Il faut donc apprendre à lâcher prise. Si la sep de ton mari décide un jour de le mettre à genoux, elle ne se privera pas de le faire, et volontiers sans préavis. Mais peut-être ne le fera-t-elle jamais. Dans l'histoire de l'épée de Damoclès, je ne crois pas avoir lu que le crin de cheval avait jamais fini par se rompre...

Efforce-toi de rester telle que tu étais avant le diagnostic.
Je m'interroge finalement sur le suivi médical de cette maladie. Mon conjoint a eu hier son rdv chez le neurologue (au CHU de Rennes, qui a plutôt bonne réputation pour la SEP), le premier depuis la mise en place du traitement (Kesimpta) en janvier dernier. Je suis assez étonnée du déroulement de ce rdv : pas d'examen clinique, deux nouvelles "petites" lésions cérébrales dans une zone asymptomatique qui n'inquiètent pas a priori la neurologue, et qui s'expliquent pour elle par le délai entre la dernière IRM (octobre 2024) et la mise en place du traitement (Janvier 2025). Et prochaine IRM dans un an seulement !
Les IRM sont très utiles pour le diagnostic. Ensuite, mon point de vue personnel à moi que j'ai, c'est qu'elles ne servent plus à rien. Il s'est écoulé cinq ans entre ma première IRM, celle de mon diagnostic, et la suivante... celle d'un deuxième diagnostic, parce que ça se passait dans un autre pays. Et trois ans pour celle d'après, qui se passait encore dans un autre pays, donc troisième diagnostic (tu noteras en passant que la sep n'empêche pas de voyager). La sep n'est de toute façon pas une maladie de l'urgence, les traitements ont l'efficacité qu'ils ont (c'est à dire : modeste), à quoi bon faire des IRM tous les six mois ? La dernière IRM cérébrale que j'ai faite remonte à plus de neuf ans et encore, pour une affaire qui n'avait rien à voir avec ma sep.

Je suis plus chagrin par l'absence d'examen clinique, qui aurait pu objectiver une éventuelle évolution (ou régression) des symptômes. Mais bon, pour l'instant les symptômes de ton mari me semblent exclusivement sensitifs, et le sensitif est quasi impossible à objectiver à l'examen clinique.
Elle présente le Kesimpta comme ayant un taux d'efficacité de 99%. Je ne suis pas allée vérifier mais ça me semble beaucoup.
mdr mdr mdr

Ah bon ? mdr

L'ofatumumab (principe actif du Kesimpta) est un anticorps monoclonal relativement récent dans la prise en charge de la sep, on a peu de recul à son sujet : il n'a son AMM que depuis quelques années (2021 ?), or quatre ans dans une maladie qui va évoluer sur plusieurs décennies comme l'est la sep, c'est (je suis sûr que tu en avais déjà l'intuition) que dalle. Comme il s'agit d'un anticorps monoclonal, il est sans doute incroyablement efficace (je ne vais pas vérifier, mais 99% ne me paraît pas aberrant) pour réduire à peau de chagrin le risque de poussée tout autant que celui d'apparition de nouvelles lésions à l'IRM. Il a probablement une certaine efficacité pour réduire un petit peu la progression du handicap à long terme (pour l'instant on n'en sait rien, vu que pas le recul suffisant, mais on peut raisonnablement le supposer), mais après vingt ans de maladie, à deux ou trois ans près ton mari se retrouvera au même stade, que celui-ci soit pimpant ou grabataire, qu'il ait pris le traitement toute sa vie ou rien pris du tout pendant ce temps.

Les poussées de sep sont pénibles, certes, mais en général on en récupère bien, surtout en début de maladie : leur rôle est mineur dans l'accumulation d'un handicap éventuel sur le long terme. Lutter contre les poussées, ce que font très bien les traitements actuels (et ce que fait brillamment l'ofatumumab avec ses 99%), n'a donc, de la même façon, qu'un rôle tout aussi mineur dans l'accumulation du handicap sur le long terme. Or l'accumulation du handicap au fil du temps est bien la seule chose qui nous intéresse, non ?

En fait, dans la sep tu as deux composantes, une composante inflammatoire focale aiguë (les poussées, qui peuvent être très impressionnantes mais qui seront suivies de rémission) et une composante neurodégénérative beaucoup plus sournoise, qui bien qu'étant déjà à l'œuvre dès le déclenchement de la maladie, va rester invisible (asymptomatique) pendant des années. C'est essentiellement cette composante neurodégénérative qui va, au fil des années, finir par provoquer un handicap permanent. Aucun traitement actuel n'a pour l'instant montré la moindre efficacité contre cette composante neurodégénérative. Tu t'interrogeais d'ailleurs sur un éventuel passage en progressive de ton mari : pour une sep qui commence sous la forme rémittente, au fil du temps les poussées vont naturellement s'espacer, puis disparaître (naturellement : même si tu ne prends pas de traitement). Toujours au fil du temps, le lent travail de sape de la neurodégénérescence pourra finir par faire apparaître de nouveaux symptômes, qu'on ne pourra pas attribuer à une quelconque poussée. C'est l'objectivation de cette apparition de nouveaux symptômes indépendants de toute poussée (en général, ça prend facilement un an d'observation pour être sûr) qui permettra d'avancer un diagnostic de forme progressive. La frontière est floue : tu l'avais déjà compris.
Je suis donc partagée : j'ai envie de faire confiance, de me dire que tout va bien se passer, de ne plus y penser et de "vivre la vie normalement" comme le conseille la neurologue. D'un autre côté, tout ce que j'ai lu sur le sujet me laisse penser que les choses ne sont pas si simples que ça. Enfin peut-être qu'elles le seront ... ou peut-être pas ... On en revient toujours à la question de la gestion de l'incertitude !
Tant qu'il n'existera pas de traitement efficace contre la composante neurodégénérative de la sep, l'incertitude continuera à régner.

Le conseil de vivre normalement est cependant le meilleur qu'on pouvait vous donner, à toi et à ton mari. Avec la sep, vous prenez (violemment) conscience de la fragilité de l'existence, mais cette fragilité est universelle, elle touche chaque être humain. Je crois sincèrement qu'on ne peut vivre pleinement qu'en étant conscient de cette fragilité.

Mébon, dans ton cas ça implique de toute évidence un changement de logiciel mdr

Tu en es capable !

A bientôt,

Jean-Philippe