M'ââme la baronne,
Baronne a écrit :Tout a commencé par une douleur dans la jambe [...] En même temps, j'avais un peu mal à l'épaule et au niveau des cervicales [...] grosse fatigue [...] grosse faiblesse musculaire dans la main, impossible de tenir mon stylo correctement [...] hémiparésie droite
Grâce aux traces de lésions plus anciennes à l'IRM, tu as pu avoir ton diagnostic immédiatement. Ce qui signifie aussi que ce n'était pas ton premier épisode.
C'est ça qui me rend un peu perplexe. Ton premier épisode, ou tes épisodes précédents (qui sait ?) étaient alors asymptomatiques, à moins que bien que présents, sensibles, ils ne t'aient pas alarmée plus que ça. On a dû t'inciter à rechercher dans ton passé tel ou tel trouble neurologique, tu n'as vraiment rien trouvé ?
Si ça me rend perplexe, c'est parce que cette poussée que tu décris me semble assez similaire (amplitude, quantité de symptômes différents) à celle qui m'avait valu mon diagnostic, et qui était la troisième en deux ans et demi. Dans cette troisième poussée j'avais eu des symptômes en plus par rapport à la tienne (diplopie, agueusie, spasmes, violents vertiges, j'en oublie), des symptômes en moins (pas de douleurs particulières à part les spasmes, pas de parésie mais une "faiblesse dans la jambe droite" qui m'avait valu d'embrasser le sol à deux ou trois reprises). Pas de problème évident pour tenir mon stylo, mais je n'arrivais pas à tenir une tasse de café sans en renverser, ni à écrire un mot sur un clavier sans faute de frappe, donc on va considérer que c'est pareil
. Malgré la violence de cette poussée par rapport aux deux qui l'avaient précédée, purement sensorielles (paresthésie de la main et du visage, du côté droit), le neuro qui m'avait alors diagnostiqué, qui est celui-là même que j'ai revu en juin et qui bossait lui aussi à la Salpé à l'époque, m'avait tout de même déclaré que j'avais une bonne probabilité pour que ma sep soit bénigne. Il avait ensuite pris toutes les précautions d'usage pour bien m'expliquer que tout ça n'avait aucune espèce d'importance pour le cas particulier de chaque patient (il n'avait pas dit "dans votre cas", mais c'était évidemment ce que j'en avais compris), reste qu'il avait auparavant clairement et explicitement prononcé le mot "bénigne". Je mets aujourd'hui de tels propos sur le compte de sa jeunesse
, mais il avait justifié ça par le temps qui s'était écoulé entre mes deux premières poussées, vingt-sept mois (contre quatre seulement entre la deuxième et la troisième).
Parenthèse : ce neurologue présente une différence de taille par rapport à la tienne, c'est que dès l'origine il était spécialisé en particulier sur la sclérose en plaques, ce qui ne me semble pas être le cas de la tienne. Fin de la parenthèse.
Les connaissances que j'ai glanées par la suite sur la bête (en 25 ans, j'ai eu quelques occasions...) m'ont confirmé que le temps qui séparait les deux premières poussées était de "bon" pronostic. Elles m'ont également indiqué qu'une sep qui commençait avec un seul symptôme présentait en effet une probabilité supérieure d'être "douce" qu'une sep qui commençait avec plusieurs symptômes : ma troisième poussée était certes un feu d'artifice de symptômes différents, mais les deux premières étaient mono-symptomatiques. Enfin, une poussée inaugurale sensorielle était de meilleur pronostic que si elle présentait une atteinte de la motricité.
Je n'exclus pas que cette... opinion qu'il pouvait avoir était sincère, c'est à dire qu'elle n'était pas formulée dans le dessein unique de me rassurer, mais qu'il y croyait réellement, et tellement que cela aura pu justement expliquer sa grande retenue devant la perspective de me basculer sous traitement : à l'époque, l'interféron-bêta venait d'être mis sur le marché, c'était un espoir immense, à la Salpé on était un peu au courant, et je rentrais dans le profil. Pourquoi donc a-t-il toujours, à chaque fois que la question s'est posée, fait preuve de si peu d'enthousiasme ? Mystère et boule de gomme
. Huit ans plus tard (2003), il avait, par courrier, justifié ce manque d'enthousiasme à ma neuro genevoise par le fait que j'avais "toujours bien récupéré de mes poussées". Je parle bien de "manque d'enthousiasme", je suis bien persuadé que si j'avais voulu initier un traitement, il n'aurait pas fait d'histoires.
Ceci étant posé, on va pouvoir s'intéresser à ton cas : ce que j'ai identifié comme raisons possibles, pour ne pas dire probables, à son manque d'enthousiasme, lui est-il applicable ? La bonne récupération à la suite d'une poussée, déjà, check. La question à mille francs, maintenant, c'est : doit-on considérer la poussée de ton diagnostic comme la poussée inaugurale de ta maladie ? Selon moi, certainement pas, puisqu'on n'aurait alors pas la dissémination dans le temps, or tes IRM ont clairement montré des lésions "anciennes", signes d'une activité antérieure de la maladie. Ta poussée précédente, ou tes poussées précédentes, étaient encore mieux que monosymptomatiques, elles étaient asymptomatiques, et leur récupération forcément bonne : deuxième check donc, reste deux. Elle n'a pas, ou elles n'ont pas, atteint ta motricité : troisième check.
Ne reste plus que le temps qui a séparé tes deux premières poussées, et là c'est un peu le brouillard : pas check donc, point d'interrogation... Et c'est pourquoi il serait, je pense, réellement important pour toi que tu replonges dans ton histoire personnelle à la recherche de l'événement le plus insignifiant, qui pourrait être rattaché à la sep. Quand j'ai été diagnostiqué, étant donné la forme très, très différente qu'avait prise la poussée du diagnostic par rapport aux deux précédentes, lors du questionnaire neurologique il m'avait fallu un sacré bout de temps avant d'admettre, et encore du bout des lèvres, qu'il pouvait y avoir un lien entre mes deux premières poussées, et la troisième : pour moi c'était tout sauf intuitif, ça ne
pouvait pas être la même pathologie. Beh si, finalement...
J'ai été lire ton compte rendu. En effet, ce qui y est décrit est radicalement opposé à mon expérience. Et j'allais dire, tant mieux !
Tu envisages plus loin dans ton message d'obtenir un deuxième avis, si jamais : mon neuro est donc toujours en activité, il exerce aujourd'hui à la Fondation Rothschild, Dr Olivier Gout. Il m'avait fallu un peu moins de trois mois pour obtenir un rendez-vous en consultation avec lui. A mon avis, après avoir lu ce que tu en racontais, ton "collège d'experts" de la Salpé s'est réuni du seul fait de l'intolérance que ton organisme a manifestée vis à vis d'un traitement en particulier, pas pour étudier la nécessité dans ton cas d'un traitement quelconque, parmi la large palette actuellement disponible. Les effets secondaires ne sont d'autre part pas les mêmes d'un traitement à l'autre...
Et si les IRM ne servent en rien à mesurer l'état clinique du patient comme tu le dis (je suis d'accord), elles peuvent sans doute expliquer son état neurologique et la gravité de la maladie.
Il faut que ça mûrisse encore dans ton esprit : l'examen clinique neurologique, c'est pas fait pour les chiens
. Au fait, aucun neuro ne m'a jamais parlé de mon edss, je n'ai eu l'information que dans les différents courriers que Gout envoyait aux différents toubibs qui me suivaient par la suite, et dont il me faisait parvenir une copie.
Bonne digestion,
Jean-Philippe.